La mondialisation. Regards sociologiques

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La Mondialisation : regards sociologiques



La mondialisation n'est pas nouvelle ! Sur un plan socio-économique, ce que l’on a tendance à qualifier de mondialisation s’apparente à une étape supplémentaire dans un processus déjà ancien de rationalisation des économies. Par contre, des formes nouvelles peuvent émerger (nouvelles technologies, usage de la flexibilité comme outil de recomposition permanente des règles, diffusion de modèles socio-politiques) en appui de cette rationalisation ;

- sur le plan des représentations collectives, ce qui serait nouveau, c’est la croyance, de plus en plus partagée, dans certaines valeurs, comme la supériorité du modèle de la consommation, la croyance en un progrès technique engendrant un progrès social, et plus généralement que le bonheur est associé au développement des techniques ;

- ce qui n’empêche pas que, sur un plan identitaire, demeurent des pratiques et des croyances plus anciennes, localisées, que les individus se réapproprient, en interaction avec les deux autres tendances (exemple : une femme iranienne portant le voile tout en effectuant des recherches de biologie avec un microscope et un ordinateur) ;

- enfin, on peut remarquer qu’ont lieu des moments éphémères de communion, à l’échelle mondiale. Mais que ce qui est sans doute notoire ici, c’est plus le caractère éphémère, qui s’inscrit parfaitement dans le cadre du marché à grande échelle.

Si la mondialisation, en déplaçant la scène traditionnelle de la citoyenneté, de l’économique et du politique dans les interstices du « global » (zones franches, diasporas, espaces frontaliers…) a comme effet de faire l’éloge de la liberté d’expression et de la différence, fût-elle standardisée, d’insister sur la multiplicité des héritages culturels d’une société, l’ordre marchand ou la (seule) culture sont-ils des médiations institutionnelles pertinentes pour dire la justice et l’injustice ?

Faut-il, au nom de cette mondialisation en marche, construire une nouvelle citoyenneté « modulaire » ou « flexible », se construisant en rupture avec les postures nationales comme avec les enracinements locaux ?

Au cours des années universitaires 1998 et 1999, les chercheurs de l’ERESMO (Equipe de recherche du CNRS sur l’emploi, la socialisation et la modernisation, au sein du LSCI) ont organisé un séminaire collectif sur la mondialisation. Alors que ce thème semble, a priori, l’apanage des économistes (la globalisation des marchés), des juristes (la constitution d’un droit international), des médiologues (le temps virtuel et la révolution informationnelle) et des politologues (l’ordre mondial et sa « gouvernance »), nous avons cherché à montrer que les paradigmes de la sociologie pouvaient aider à en clarifier les termes et à en comprendre les “ mécanismes ”.

Ce travail de recherche a fait le choix d’une double visée théorique :

1) Une réflexion sur les rapports socioculturels entre les sociétés globales et ces institutions, que sont les entreprises, qui accompagnent et donnent sens aujourd’hui à des formes de délocalisation du capital, de flexibilité de la main d’œuvre, de postfordisme... Si l’entreprise, dans un contexte mondialisé, produit du social, elle reçoit aussi, en provenance des cultures nationales ou des effets sociétaux, des conditions d’agencement des conduites collectives. Dans le même temps, le poids des contingences externes n’épuise pas l’influence de l’entreprise comme lieu autonome de production de représentations. La question de la modernisation en entreprise, ainsi posée, apparaît porteuse d’une interprétation plus large du changement social et de la modernité.

2) Une réflexion sur l’acteur, défini par sa capacité à construire l’action collective, consistant à identifier des motivations et des trajectoires biographiques qui ne sont réductibles : ni à l’intérêt des approches du “ rational choice ” ; ni à l’hégémonie de l’acteur dirigeant ; ni à des modèles de prévisibilité des conduites, en adaptation aux diverses contraintes de l’environnement.

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