« Grande Démission » ? « Grande Flemme » ? Comprendre pour agir !

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A vec Eric Mellet, nos actions de formation et de coaching ainsi que nos partages d'expérience réguliers, nous ont révélé à quel point la question de la place réelle du travail pour jeunes et moins jeunes était au coeur des préoccupations de nos clients. Que pointaient sans cesse de fortes interrogations sur une quête de sens au travail, une supposée baisse tendancielle de motivation, et plus largement, un renouveau des formes d’engagement dans la sphère du travail.

Qu’en penser vraiment ? « Grande Démission », « Grand Bouleversement », « Grande Flemme » ?

Nous serions à un moment charnière, à un tournant franchi. De 10,3 % de taux de chômage en 2015, au sens du BIT, nous sommes passés à 7,3 % de la population active fin 2022. En moyenne, une offre d’emploi attire désormais moins d’un candidat alors qu’ils étaient 2. 60 à se manifester en 2021. Ces chiffres varient du simple au triple selon les secteurs. La branche de la santé attire, par exemple, une moyenne d’à peine 0,4 candidat par offre ! Plus de 4000 postes de professeurs étaient restés non pourvus en juillet 2022. Manquera-t-on, à nouveau, de candidates et candidats à la rentrée 2023 ?

La « désertion » vient toucher des professions cruciales pour le simple fonctionnement quotidien de notre société.
Alors que le travail a, pour la plupart d'entre nous, constitué le socle, voire le sens majeur de l'existence, il semble ne pas en être de même pour des personnes qui ont envie d’avoir plusieurs vies professionnelles à vivre en même temps ou de « sortir du système ».
Aussi, c'est à travers quatre billets que nous nous proposons de tenter un décryptage des dynamiques à l'œuvre et que nous conclurons par la force de la différence, chère à Norbert Alter, de celles et ceux que nous nommons « déviantes et déviants positifs ».

Pour cela, nous croiserons regards et expériences issus de nos formations, nos conférences, nos enseignements universitaires ou nos coachings et de quatre champs disciplinaires :

- Sociologie de l’entreprise
- Management Interculturel
- Psychologie Positive
- Organisation Apprenante ...

et de trois niveaux d'observation…

- La société globale
- Les cultures d’organisation
- La vie en équipe avec des « déviants positifs »

Dans nos quatre billets, vous trouverez, et nous assumons ce choix, considérations sociologiques et conseils pratiques de management. Si le seul outil dont nous disposons est un marteau, tout autour de nous ressemblera à un clou !

Nous chercherons à déconstruire des idées-reçues telles que « les Français seraient paresseux, et bien plus que les Allemands ou les Scandinaves… », que la « Grande Démission » serait synonyme de « Grande Paresse », que la paresse c’est l’inaction et le repli sur soi, que les jeunes ne voudraient plus travailler et sont plus individualistes que leurs ainés, que la crise sanitaire aurait finalement inauguré, en trois années, un rapport inédit au travail.... 

Au-delà des discours définitifs ou tonitruants, une révolte plus silencieuse se propage et qui renvoie au type de société que nous voulons construire demain. Et si les symptômes d’une rupture de la jeunesse avec le « sens du travail » dissimulaient, en réalité, la forêt du doute et même de la résignation face à un certain avenir que l’on ne veut plus ? Les Stakhanov se transforment-ils en Oblomov, ce personnage du roman éponyme d'Ivan Gontcharov affecté par une indécrottable apathie et la tentation du divan ?

Dans un premier billet (Crise de l’engagement et « Grande Démission » dans une société en « archipel »), nous interrogeons la notion même de « Grande Démission », cherchons ses sources et en relativisons la portée.

Dans un deuxième billet (Vivons-nous réellement la fin de la centralité du travail dans nos vies et pourquoi ce "Grand Bouleversement" ?), nous explorons une demande généralisée d’aplatissement des structures hiérarchiques et, plus largement, une érosion des figures traditionnelles d’autorité.

Dans un troisième billet (Grande Flemme ou renouveau de l’engagement ?), nous mettons en doute certains effets de la technologie galopante sur le bien-être et soulignons une face plus sombre de la société de confort.

Dans un quatrième billet (La place des déviants positifs), nous en appelons à la force des atypiques et mettons en garde contre le « Grand Adéquationnisme » qui toujours célèbre mimétisme et entre-soi et ce, dès le recrutement. Nous valorisons la force de la rencontre et des atypiques si ceux-ci sont généreux et délivrent du résultat au-delà de leurs seules différences.

Nous sommes questionnés par David Lambert dirigeant de FuturGo, un cabinet conseil innovant dont les équipes sont convaincus que placer ensemble l'innovation au service des entreprises confère un avenir plus sûr ! Et qu’il convient de fonder un nouveau pacte de loyauté et d’engagement entre employeurs et employés.

 

 

« Grande Démission » ?

"Je suis venu te dire que je m’en vais,
Et tes larmes n'y pourront rien changer…"

L e constat semblerait sans appel : nous vivrions une crise du travail, de l’engagement et un vaste temps de désertion : les jeunes ne sauraient plus s’investir et les autres seraient convaincus que « plus rien ne sera jamais comme avant » dans leur vie au travail !

On appelle cela, depuis trois ans, la "Grande Démission". Une partie de la population rechigne à revenir dans le rang et un certain type de carrière ne fait plus rêver.

Depuis le début de l'année, la France connaît une vague accentuée de démissions. Plus de 1 million de Français, en contrat à durée indéterminée (CDI), ont quitté leur emploi, soit 15% de plus que l'année précédente.

Entre fin 2021 et 2022, on a enregistré près de 520 000 démissions par trimestre, dont 470 000 démissions de CDI. Le record précédent datait du premier trimestre 2008, avec 510 000 démissions dont 400 000 pour les seuls CDI.

Un phénomène qui devrait durer tout au long de 2023 : 42% des moins de 35 ans envisagent même de démissionner dans les 12 prochains mois.

La moitié des jeunes français sont prêts à démissionner s’ils ne peuvent pas télétravailler (ce télétravail représente, début 2023, 20% des heures de travail de l’emploi salarié).

Une nouvelle source d’insatisfaction a fait son apparition : l’impossibilité de pratiquer le télétravail. 40 % des travailleurs pratiquent le télétravail au moins occasionnellement, et 33 % régulièrement (au moins un jour par semaine) contre seulement 7 % avant la crise sanitaire et la crainte épidémique. 40% des jeunes préfèrent être au chômage qu’être malheureux au travail. 40% qui démissionnent le font pour une question de « valeurs ».

Les démissions ont certes atteint un taux record mais demeurent en territoire connu et les personnes reprennent ensuite un emploi. Sur 10 personnes ayant démissionné d’un CDI au second semestre 2022, 8 étaient à nouveau en emploi dans les 6 mois qui ont suivi. Elles ont donc trouvé mieux ailleurs.

En quoi peut-on parler de « Grande Démission » ?

Billet 1/4 Crise de l'engagagement et "Grande Démission" dans une société en "archipel" ? 

Par Eric Mellet, www.mellet-consulting.com et Philippe Pierre, www.philippepierre.com
10 points en résumé : 

D ans ce billet, derrière le terme de « Grande Démission », nous pointons plusieurs phénomènes explicatifs de ce qui serait une baisse tendancielle de l’engagement dans les sphères du travail :

  • Alerte à « l’emploi » ! Ou alerte au « travail » ? La grande majorité des entreprises ou organisations publiques ou privées peinent à trouver des candidates et des candidats. Elles disent faire face à des difficultés de fidélisation rarement connues sur les trente dernières années ;
  • Derrière ces difficultés bien réelles, un constat : le « travail » ne serait plus aussi central dans nos vies. Il serait moins notre carte d’identité principale ! Le modèle culturel que nous nommons de la « loyauté » (hiérarchique/pyramidal/de long terme) est attaqué par celles et ceux qui doutent ouvertement de sa valeur. L’individualisation des parcours professionnels n’a cessé, depuis quarante ans, de réduire l’ancrage collectif au sein des entreprises (force et utilité perçue des partenaires sociaux, confiance en sa hiérarchie directe, restructurations, importance des ratios financiers dans le quotidien…) ;
  • Face à la figure du chef en surplomb et ses principes de légitimité verticale, formes d’autorité propres à la « loyauté » et à la période des « trente glorieuses », la recherche d’employabilité en « réseau » et des carrières en « archipel » ne cessent de gagner du terrain chez les jeunes (les « slasheurs » notamment) mais aussi les moins jeunes qui ont pu réviser leurs trajectoires de vie - pendant et après - les temps de sidération de la Covid-19 ;
  • Plus largement, c’est la figure du « sachant », en promontoire, qui est discutée dans notre société, comme dans nos entreprises, et nous devons composer dorénavant avec un phénomène de « renversement de la présomption de compétences ». Celle ou celui qui « savent » doivent sans cesse prouver à ceux qui apprennent qu’ils savent (vraiment) et cela au risque d’être porté très vite devant les tribunaux ;
  • La souffrance, l’abnégation et la réussite au travail ne vont plus ensemble dans un implicite quelque peu doloriste de la « loyauté » : c'est la recherche du plaisir que l’on peut prendre « ici et maintenant » et d’un équilibre « vie-personnelle/vie professionnelle » qui prédominent aujourd’hui dans les attentes de celles et ceux qui entendent passer du modèle du « Père » aux promesses des « pairs » ;
  • Avant de parler du sens de l'effort, il faudra toujours commencer par donner du sens à l'effort.Nous vivons un saut de complexité croissante qui invite, plus que jamais, à passer - ou plutôt associer - une vision mécanique (« loyauté ») à d’autres visions plus organiques de la société et des organisations (vers l’« archipel »). Dans ce passage, le « turbo-capitalisme », celui des grandes structures anonymes et de l’informatisation à outrance, a, pour nous, moins d’atouts que les PME et ETI innovantes, mais aura malheureusement toujours plus de moyens pour se monter « désirable » auprès de celles et ceux qui intègrent le marché du travail ;
  • Si « Grande Démission » il y a, ce que nous relativisons, elle est à interpréter, selon nous, à l’aune d’une transformation progressive de la notion d’effort physique et moral et du poids écrasant des technologies dans notre quotidien. Un poids qui souvent renforce l'inconfortable impression d'être ensemble... mais seuls ;
  • C’est moins la critique du travail que celle de l’emploi, celle d’un emploi morne et routinier, qui prend davantage d’espace chez nos contemporains. Qui veulent travailler… mais autrement ;
  • Dès lors, une société en « archipel » valorise le dépassement de soi dans le travail (l’humain comme sujet par le travail) tandis qu’une société « en fragments » fait courir à toutes et tous le risque de sortie du symbolique et de perte d’ancrages existentiels (l’humain comme objet à cause du travail) ;
  • Nous concluons par quelques conseils propres à une posture managériale « d’étonnement volontaire » et soulignons, face à ces enjeux de reconnaissance, un nécessaire « optimisme de combat », si cher à Michel Serres !

Vous croiserez, dans ce billet, des manifestantes et manifestants, Socrate, Nietzsche, des bloggeurs, des slasheurs, un chien noir en capuche jaune, un potager, une start-up, différents types d’archipels, Alain Souchon, plusieurs manières d’être jeune, une espérance…

"Grand Bouleversement" ?

Commencer le repas de la vie par le dessert ?

E n 2003, déjà, dans un ouvrage titré Pourquoi j’irais travailler ?, les auteurs, dont le sociologue Renaud Sainsaulieu, se demandaient sur quels ressorts agir pour « attirer, intégrer et fidéliser » et l’on soulignait alors la naissance de services de pressing, de garde d’enfants ou la mise à disposition d’ordinateurs portables (Eric Albert et Allii, Pourquoi j’irais travailler ?, Eyrolles, 2003, p. IX). Tandis que grandissait une « logique davantage centrée sur l’individu », en clair sur des individus appelés à devenir gestionnaires d’eux-mêmes dans une société marchandisée et qui avaient de moins en moins confiance en leurs employeurs, les auteurs pointaient en précurseurs attentifs : « les arrêts volontaires de carrière, la pratique des congés sabbatiques longs, le travail nomade, les redéploiements de carrière et les reconversions, le télétravail, les choix professionnels au profit d’associations ou de collectivités territoriales différents de ceux centrés sur les activités classiques de l’entreprise » (Idem, p. 38). 

Vingt ans plus tard, nous y voilà. On cherche toujours des bras et des volontés. En tous secteurs et en toutes régions. On manque toujours d’aides-soignantes, de chauffeurs de bus scolaires, d’ouvriers dans la construction ou de techniciens dans l’agro-alimentaire, de serveurs et de plongeurs dans l’hôtellerie-restauration, d’informaticiennes…

On cherche toujours à attirer, intégrer et fidéliser des « talents ». Et pas que...

Vingt ans plus tard, les lieux même du travail se pluralisent : tiers-lieux/espaces coworking, open-space, travail à domicile... Qu’il y a-t-il de neuf ? Ou de vraiment neuf ?

Dans un rapport de la fondation Jean Jaurès de novembre 2022, on peut lire : « En mai 2008, soit au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, dont un des mantras était le fameux « Travailler plus pour gagner plus », 62% des salariés souhaitaient, s’ils en avaient le choix, « gagner plus d’argent, mais avoir moins de temps libre » contre 38% qui désiraient « gagner moins d’argent pour avoir plus de temps libre ». Le rapport de force entre ces deux modalités est aujourd’hui totalement inversé.

Après la « Grande Démission », le « désinvestissement tranquille » Par « quiet quitting », on entend des collaborateurs qui sont présents à leur poste de travail mais désengagés, faisant le minimum obligatoire. L’heure est avant tout à rester en bonne santé et à profiter de la vie. Une note de juillet 2022 réalisée par la Fondation Jean Jaurès illustre à merveille ce sentiment. Parmi les choses « très importantes » de la vie arrivent la famille (71%), les amis et relations (46%), les loisirs (41%) et le travail (24%). En 1990, le travail arrivait après la famille et était « très important » pour 60% des employés.

Billet 2/4 Vivons-nous réellement la fin de la centralité du travail dans nos vies et pourquoi ce « Grand Bouleversement » ?

Par Eric Mellet, www.mellet-consulting.com et Philippe Pierre, www.philippepierre.com
6 points en résumé : 

D ans ce billet, derrière le terme de « Grand Bouleversement », nous pointons plusieurs phénomènes :

- Si « Grand Bouleversement » il y a, il est d’abord à interpréter, selon nous, à l’aune d’une civilisation du confort matériel et de la transformation de la notion d’effort physique et moral comme de la métamorphose du lien social sous l’effet ultra-quotidien du numérique, de la famille dite « nucléaire » en recomposition et, plus largement, des formes d’autorité légitimes qui mutent…
- Tous les gouvernements ont accepté, en France, et plus largement, en Occident, que nous déléguions à la technologie toutes sortes de tâches laborieuses et qui conditionnaient il n’y a pas si longtemps notre rapport au monde ;
- Plus le monde social s’unifie dans ses appareillages technologiques, financiers et informationnels, plus nous pianotons sur nos smartphones, plus notre temps médiatique s’accélère, plus notre société semble se fragmenter dans ses appartenances et se fragiliser dans son assise culturelle. Dans sa capacité à porter un élan commun ;
- Au-delà du passage d’un ordre pyramidal hiérarchique à un ordre polycentrique et éclaté, un phénomène d’enchevêtrement des sphères s’étend dans le champ du travail : l’espace intime des émotions et du ressenti côtoie de plus en plus l’espace social de la tenue du ou des rôles professionnels ;
- Nous semblons passer massivement du « vivre pour travailler » au « travailler pour vivre ». Et dans le même temps », aux sources de ce « Grand bouleversement », le « turbo-capitalisme », celui des grandes structures anonymes et de l’ultra-quotidienneté du digital et du numérique dans nos vies, semble manquer de boussole : il est, en effet, possible de vivre confortablement tout en allant très mal psychologiquement. Ne confondons donc pas travail, emploi et marchandisation complète de tous les rapports sociaux. La « Gafamisation » de nos existences n’est pas sans risque. Elle pourrait conduire à la transformation de l'énergie humaine en argent en tant que fin en soi irrationnelle ;
- Face à ces risques, nous refusons le retour en arrière du « c’était mieux avant ! » et célébrons la force de la rencontre ! Qui souvent s’opère dans des PME et ETI innovantes !

Vous croiserez, dans ce billet, Renaud Sainsaulieu, un dessert qui veut être mangé en premier, l’ordre westphalien, la loi sur les 35 heures, des téléphones, beaucoup de téléphones devenus ordinateurs, la nostalgie, l’espoir, une pancarte jaune, Elisabeth Roudinesco, Régis Debray, Petite Poucette, Christophe Guilluy, Michel de Montaigne….

"Grande Flemme" ?

Debout, la France t’attend !

L e 11 novembre 2022, Jérôme Fourquet et Jérémie Peltier titrent leur rapport à la Fondation Jean Jaurès : « Grosse fatigue et épidémie de flemme : quand une partie des Français a mis les pouces ».
Valorisation du temps libre, de la sphère privée, équilibre revendiqué entre vie personnelle et vie professionnelle… une forme sombre de Covid long toucherait pourtant la sphère du travail et celle de la motivation de nos contemporains.
Seuls 12% des sondés se disent plus motivés qu’avant dans ce qu’ils font au quotidien, contre donc près d’un sur trois qui l’est moins. Les plus jeunes disent être les moins motivés, particulièrement en grandes villes. « On s’aperçoit que ces derniers ont perdu, par exemple, un quart de leur capacité pulmonaire en raison du développement de la sédentarité, alimentée notamment par les écrans » peut-on lire dans le rapport. Conséquence : les jeunes français de 2022 mettraient 90 secondes de plus à courir 1 600 mètres qu’il y a trente ans.

Quatre français sur dix se sentent plus fatigués qu’avant la pandémie. Notre corps social est-il moins résilient ?

Près d’un quart des salariés français sont actuellement en télétravail à hauteur de trois jours ou plus par semaine. « La perte de motivation au travail touche davantage les jeunes actifs (46% des 25-34 ans), mais aussi les cadres (44%) et les professions intermédiaires (43%), contre 34% « seulement » parmi les employés et ouvriers, catégories dont on notera qu’elles sont moins concernées par le télétravail ».

Un mouvement d’aplatissement des structures hiérarchiques en organisation se poursuit. Depuis longtemps, les attributs visibles de l’autorité se sont brouillés - et c’est heureux - quand les cafétérias remplacent les cantines destinées aux cadres, que le pointage n’est pas une obligation et que l’on entre tous par la même porte dans l’entreprise. Un peu partout, les cravates comme symbole vertical de l’autorité, restent rangées dans les placards. Ce qui ne veut surtout pas dire que les rapports de pouvoir et de domination ont disparu. L’apparence reste l’apparence.

Le travail est-il émancipateur et fait-il partie de notre identité, ce que défendait la philosophe Simone Weil ?
Ou faut-il chercher ailleurs la source de son accomplissement, et épouser ainsi la thèse d’une Hannah Arendt ?

Témoignage de notre temps, Le Petit Robert a informé que le terme « chiller » (de l’anglais « to chill » : prendre du bon temps à ne rien faire) a fait son apparition dans son édition 2023.


Billet 3/4 « Grande Flemme » ou renouveau de l’engagement ?

Par Eric Mellet, www.mellet-consulting.com et Philippe Pierre, www.philippepierre.com
8 points en résumé : 

D ans ce billet, derrière le terme de « Grande Flemme », la valorisation du temps libre, de la sphère domestique, du refus de se tuer à la tâche, de la volonté de commencer le repas par le dessert… nous pointons plusieurs phénomènes :

- La « Grande Flemme » illustre une remise en cause des promesses d’un pacte social basé sur une forte croissance économique, l'accroissement rapide du pouvoir d'achat et l'essor de la consommation de masse ;
- Le « turbo-capitalisme » peine à tenir ses promesses. Pour beaucoup, et depuis longtemps, l’entreprise est devenue « mortelle » et faire son travail ne suffit plus pour se garantir un avenir. Si personne ne me protège, pourquoi s’investir autant au travail et dans un temps de « loisirs » qui prête à caution ?
- Le phénomène de « Grande Flemme » n’est pas nouveau et la paresse n’est pas l’inaction ;
- Il faut associer « Grande Flemme » et recherche constante de confort. Et des limites de la "recherche de confort" sont à pointer dans une société de consommation qui rassure au prix d'une forme de passivité, de comportements régressifs où prédominent émotions et pulsions liées à la satisfaction instantanée ;
- Dans un monde de plus en plus "virtuel", ce qui fait défaut à la « loi » des écrans, c'est la « vraie » rencontre. En proximité physique. On la vit souvent dans des PME et ETI innovantes où la proximité n’est pas un vain mot !
- C’est le sens même de la place occupée par la technologie dans nos vies qui est questionné avec l’expression de « Grande Flemme » ;
- Dans un monde dominé par un désir insatiable que se promet de combler "la consommation", vivre la frustration est de plus en plus difficile ;
- Ne nous résignons pas à inventer un autre régime de vérité au sein de notre société qui place la rencontre au cœur des préoccupations sociales ! Et nous croyons, pour cela, en la force des principes de l’organisation apprenante.

Vous croiserez, dans ce billet, un chat tout à fait décontracté, un rapport de la DARES, Michel Delpech, deux types de capitalisme, Emile Durkheim, Stefano Boni, un homme allongé, des appels à fuir le travail salarié, et même le travail tout court, un vrai paresseux, les promesses de "l’organisation apprenante"…

La suite du billet en cliquant ici : « Grande Flemme » ou renouveau de l’engagement ?  



Billet 4/4 La place des déviants positifs.

Par Eric Mellet, www.mellet-consulting.com et Philippe Pierre, www.philippepierre.com

7 points en résumé : 

D ans ce billet, derrière le terme de « déviants positifs », nous pointons plusieurs phénomènes :

- Associons « pépites extérieures » et « pépinières internes » ! On ne peut plus recruter que des experts avec 5 à 10 ans d’expérience dans un métier et cela oblige à élargir constamment viviers et manières de regarder les autres pour mieux les connaître et les intégrer !
- A une approche « problème cherche solution », préférons le regard des « déviants positifs » qui nous permettent d’échapper aux solutions standardisées et aux carrières longues en « escalier » ;
- Ces « déviants positifs » ou « talents » sont utiles pour innover et faire rupture quand cela est utile. lls illustrent, pour nous, l’usage de la liberté, de sa liberté, comme pouvoir de révision des normes qui prévalent dans un collectif humain et disent souvent une « normalité » qui engourdit ;
- Ces « déviants positifs » ou « talents » sont souvent mis à mal par des personnes qui les transforment en authentiques « boucs-émissaires » ;
- Les innovateurs s’étiolent assez vite dans une organisation classique qui ne cultive pas un ou des « environnements apprenants ». Et aussi l’éducation de l’audace qui n’est pas sanction de l’échec mais expérimentation et encouragement constant à « l’essai-erreur » ;
- « Déviants positifs » et « talents » ont cela aussi en commun de vouloir « apprendre à apprendre » et d’apprécier les managers qui - leur fixant un cap et un cadre - osent le feed-back très régulier ;
- Rénover une culture d’organisation - en intégrant des profils atypiques - est certes long et exigeant mais ne peut se faire sans souci de l’équité. C’est-à-dire, savoir identifier et assumer des différences, produites précisément par les déviants « positifs » et « talents », qui profitent, au final, à toutes et tous !

Vous croiserez, dans ce billet, Marlon Brando et l’équipée sauvage, les principes de la « déviance positive », des équilibristes de l’émergence, Jacques Dutronc, un énergigramme, des pas sur le bitume, René Girard, Françoise Héritier, Colette, un lama qui vous regardera avec amour, Nietzsche en toute fin du billet…

 

La suite du billet en cliquant ici : La place des déviants positifs


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